Meeting… Josh Stewart!

Photos: Pep Kim

Interview: Benjamin Deberdt

"[…] à la seconde où j'ai fait tourner ses images sur ce son, c'était une évidence, l'idée géniale."

 Pepsi Kim

Cela nous aura pris un petit bout de temps pour finaliser cette interview, mais…
1) Le DVD est à peine enfin disponible partout dans le monde. Et 2) Il serait assez mal venu pour Josh de reprocher à quiconque de prendre son temps, vous ne pensez pas?
Donc, oui, le chapitre final de la trilogie Static aura pris un certain temps à voir le jour, mais pour valoir bien plus que son pesant d'or, au final, à une époque de saturation totale d'images, où si peu de projet se voient même offrir la chance d'un  second visionnage… Alors que celui-ci est là pour rester, et promet même de rester en mode relecture fréquente, avec les années. Oui, l'on peut parler de “classique”, et comme le confirme Josh ici, cela nécessite un tout petit peu plus que d'avoir de très bons skateurs sous la main…
Benjamin Deberdt

Il me semble, qu'en plus d'un skate bien choisi, et d'un filming au couteau, ce dernier épisode se concentre beaucoup sur le “son”, au sens large… C'est quelque chose que tu avais prévu depuis le début?
Tu es la première personne à s'en rendre compte, et à le faire remarquer. Je dirais que cela n'est devenu une priorité que vers la dernière année du tournage. En shootant tellement de 16mm, j'ai commencé à réaliser qu'il manquait un élément pour capturer l'ambiance étrange du système de métro new-yorkais. Et lorsque nous avons commencé à prendre avec nous des magnétophones dans les rames, pour enregistrer les sons qui allaient avec mes images, cela était frappant de voir comme cela m'a emmené dans un autre monde, dès que j'ai collé images et sons dans une timeline. J'aurais aimé avoir plus de temps pour développer ces expérimentations avec le son que nous faisions durant les derniers mois. Il restait encore tant de possibilités.

Je pense que la part de Steve Brandi, en dehors du skate de Steve, deviendra un “classique” rien que pour sa bande-son… Qui en a eu l'idée?
En général, c'est difficile de travailler avec moi sur une vidéo, parce que j'ai normalement des idées de morceaux pour chaque part, et j'ai du mal à changer d'avis en fonction de ce que me conseille les autres. Alors quand Steve est arrivé avec cet idée, j'étais plus qu'hésitant. J'ai commencé à trouver des raisons pour lesquelles ça ne fonctionnerait pas. Mais, à la seconde où j'ai fait tourner ses images sur ce son, c'était une évidence, l'idée géniale. C'est toujours un soulagement quand tu sais que tu as trouvé le bon morceau. Et cette fois-ci, c'était l'idée de Steve.

 Pepsi Kim

Dustin Eggeling, backside nosegrind 180

Il y a des années, j'ai appelé la Règle d'Olly Todd, l'idée selon laquelle une part ne devrait jamais utiliser un morceau meilleur que le skate qu'on y voit. Que donc, tu ne peux pas monter tes tricks basique de skatepark sur les Doors, par exemple… Ça te parle?
[Rires] Oh, mec, c'est trop marrant. Je suis tellement d'accord. Je suis tellement dégouté lorsque je vois une chanson incroyable utilisée dans un montage internet pourri. Mais, en toute honnêteté, il existe tellement de media skate de nos jours, que tu dois presque ignorer le reste, et utiliser ce dont tu as envie. Bien sûr, tu ne peux pas réutiliser un morceau déjà utilisé dans un “classique”. Mais si tu as dégotté un bon morceau pour une part, et qu'une autre vidéo sort la première avec le même morceau, je me dis que c'est OK si tu l'utilises aussi. Cela dépend. C'est ce qui est arrivé pour la part de Vivien Feil. J'avais sa part montée sur le même morceau depuis presque cinq ans. Et puis, quatre mois avant l'avant-première de New York. Une part en ligne est sortie sur le site d'un mag européen avec un gars qui skatait sur le même morceau. J'étais tellement dégouté… Mais, heureusement, nous avions une chanson de secours. Et, au final, j'ai fini par préférer celle-là, de toute façon. Mais, Doux Jésus!

Il est assez évident qu'une part est une collaboration entre un skateur et un filmeur, mais est-ce que tu laisses les gens t'influencer, ou tu sais ce que tu veux atteindre, et tu les y amène?
Cela dépend beaucoup du skateur. Je dirais, que la plupart du temps, j'ai une idée derrière la tête, et je vais tout faire pour lui faire voir le jour. J'écoute les suggestions et les idées du skateur, mais au final je pense plus à cette part comme faisant partie du look et de l'ambiance de toute une vidéo dans son ensemble. Et le skateur pense lui plutôt à sa part, comme un projet personnel. Donc, c'est un processus fait de discussion et d'engueulades. Mais, j'ai déjà vu mes certitudes  bousculées par des skateurs qui avaient d'excellentes idées. Même si cela me prenait souvent longtemps pour les accepter. Je dirais que trois bons exemples sont Ed Selego dans la One Step Beyond d'Adio Shoes, Bobby Puleo dans Static II et Steve Brandi dans Static IV. Et le plus drôle est que ce sont probablement trois de mes parts favorites auxquelles j'ai eu le plaisir d'être associé. Et à chaque fois, ce sont les skateurs qui ont choisi leur morceau. Et ça tuait à chaque fois.

 Pepsi Kim

Quim Cardona

Il y a quelques années, tu m'avais confié qu'aider les skateurs plus âgés “à voir la valeur de leur skate” était souvent l'aspect le plus difficile de ton boulot. Comment ça s'est passé pour une vidéo ou deux “anciens” ont des part importantes, à juste raison, de la vidéo?
Oui, souvent, les skateurs les plus incroyables, ceux que l'on peut qualifier de “classiques” que l'on aime tous, et que l'ont veut voir plus, ne voit pas ce qui fait que les gens ont envie de les voir skater. Donc, souvent, je me suis retrouvé dans le rôle de conférencier motivationnel, à essayer de convaincre des skateurs de la valeur de leur présence sur une board. Je trouve ça chouette que pas mal de ces gars n'aient pas d'égo démesuré, et ne trouvent pas légitime l'aura qui entoure leur skate. Mais tu en arrives au point où j'étais obligé de supplier des gars de me faire confiance, que les gens veulent juste les voir skater. Je dirais que Ricky Oyola dans la Static II est le parfait exemple. Sérieusement, il voulait que je n'utilise que deux tricks de lui! Il trouvait que le reste n'était pas terrible, et qu'il ne méritait pas une part. Et jusqu'à aujourd'hui, des gens me disent que c'est une de leur part favorite, et que j'aurais dû lui donner la dernière part.

 Pepsi Kim

Jahmal Williams, ollie up kickflip fakie

Pour revenir à la musique, Jahmal Williams skatant sur "Egypt Egypt" m'a cloué… Tu pourrais expliquer aux plus jeunes en quoi c'est le combo parfait?
[Rires] Oh, mec. C'est marrant parce que tellement de fois, en travaillant sur ce projet, je me suis dit: “J'aimerais pouvoir expliquer à ceux qui regarderont la vidéo pourquoi on a fait ça!” Voila ma chance! Bon, je pourrais en parler des heures et saôuler tout le monde, donc je vais essayer de résumer en quelques phrases.C'est un morceau d'Afrika Bambaataa [avec Egyptian Lover, NDLR] qui est l'un des deux artistes crédité pour avoir posé les fondations de la musique hip-hop. À cette époque, le b-boying (le break dance) et le hip-hop allaient de pair, et ce morceau capture l'ambiance d'un New York que nous idéalisons comme un âge d'or. Jahmal faisait du break avant même de commencer le skate, et il est aussi l'une de ces personnalités qui ont posé les fondations du skate underground East Coast. Et puisque le thème général de la Static IV est celui du métro de New York, c'était le morceau parfait.

Une fois que les candidats “évidents” étaient inclus dans le projet, comment tu as choisi les membres de la nouvelle génération? Tellement de gens “méritent” de nos jours…
C'est vrai. Ce serait impossible pour moi de regarder la scène actuelle, pour ne choisir que quinze skateurs qui représentent la “vibe” Static. C'était plus une question de personnalité et de gens avec qui je me suis bien entendu. Je n'avais décidé que quatre parts pour cette vidéo, au départ. Mais, en filmant, différents skateurs rejoignaient la session, et certains comme Brendan Carroll ou Kevin Tierney sont des personnages tellement humbles et agréables que tu finis par vouloir les impliquer au projet. Et puis, il y a des skateurs comme Jake Johnson ou Vincent Alvarez dont le style et la personnalisé sont si uniques et complètement en ligne avec les skateurs que Static a documenté dans le passé, que je les voulais à bord, même s'ils n'étaient plus “underground” réellement. Ça m'importait beaucoup de les avoir.

 Pepsi Kim

Maintenant que tu vas pouvoir prendre ta retraite, qui suis-tu dans leur documentation du skate?
Ouh, là, du calme! [Rires] Je n'ai jamais dit que je prenais ma retraite! Je suis peut-être obligé de mettre un terme à la série Static, mais cela ne veut pas dire que je ne serais plus impliqué dans des projets indépendants ici ou là. Je ne peux juste plus travailler sur une vidéo qui prendra quatre à cinq à faire, si ce n'est plus… Mon corps ne tiendrait pas. Mais, cela dit, on trouve plein de vidéographes intéressants au travail très excitant. Et le monde de la vidéo est si ouvert aujourd'hui que je pense que nous allons voir pas mal de talents émerger de nul part. Personnellement, je suis toujours plus à fond de choses complètement différentes de ce que les autres font. Donc, les vidéos Bronze de  Peter Sidlauskas, le travail de Pontus Alv… Pas mal de vidéos japonaises m'ont impressionnées aussi, comme le travail de Takahiro Morita, et les vidéos de Shinpei Ueno. Mais je pense qu'avec tous les nouveaux outils disponibles, nous allons voir pas mal de choses bizarres et fantastiques sortir d'endroits inattendus, et entendre parler de filmeurs inconnus. Le skate est prêt pour des choses qui sortent vraiment de l'ordinaire dans la manière de le filmer, et j'ai hâte de voir ce qui va pousser des cerveaux de la scène underground d'aujourd'hui.

Vous pouvez, mais surtout devriez, vous procurer un exemplaire du DVD, contenant un booklet de photos, ici.

Et, en attendant, voile de quoi illustrer le travail impeccable de mise en son du skate dans la Static IV:

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