Soy Panday, le seul, l'unique ; en plus de déambuler sur vingt ans d'images de rue, visionnables en exclusivité sur LIVE ci-dessus, entre deux séries de graphiques de board pour Magenta, celui qu'on appelle Roy passé minuit, propriétaire attitré de multiples fontaines avec un certain don pour les spots urbains, les lines savantes et les backside flips nous a fait l'honneur d'échanger avec nous, avec vous, quelques mots au sujet de ce nouveau projet à la forme inédite. En images, la déferlante de démonstrations par delà les époques ; en texte, la rencontre !
"En 2000 j’avais vingt-trois ans, aujourd’hui j’en ai quarante-et-un, le comparatif est intéressant"
Ensuite, j’avais chez moi trois vieilles VHS de 2001, de l’époque où j’étais jeune étudiant à Grenoble, autour de mes tout premiers "flow sponsors" (Osiris puis I-Path)... Je n’avais pas vu ces vidéos depuis plus de dix ans, et un pote m’a récemment aidé à les numériser, et je me suis dit que ce serait drôle de glisser des vieux trucs dans cette part, de partager avec d’autres des vieilles images que personne n’a vu ; et pour moi aussi, d’avoir un souvenir bien emballé, crafté par quelqu’un de passionné.
LSM : Qui a filmé toutes ces vieilles images ? A quand remontent les plus anciennes ? Et les plus récentes ?
Soy : Toutes ces vieilles images remontent à 2000, 2001. Elles sont extraites de deux petites vidéos locales : une de Grenoble (filmée par MDV) - et une de Voiron, et aussi de la vidéo "Parasite" de
Pierre Prospero, avec mes premières images à Paris. Les trois parts datent de la même année, il y a des tricks qu’on retrouve dans les trois vidéos...
Les images récentes sont filmées par toi, au cours des deux dernières années, en se croisant de manière un peu sporadique.
En 2000 j’avais vingt-trois ans, aujourd’hui j’en ai quarante-et-un, le comparatif est intéressant, ça juxtapose deux périodes bien éloignées. A l’époque, j’étais étudiant en économie parce que j’avais abandonné mon rêve de devenir dessinateur de bandes dessinées, et je faisais du skate du matin au soir. Le rêve de faire un truc dans le skate, je n’ai jamais réussi à l’abandonner, et je l’ai laissé me guider, me faire rencontrer des gens ; il a décidé pour moi.
Et il a fini par faire de moi un dessinateur de B.D. d’un genre que je ne connaissais pas encore : une B.D. où chaque case est une série de boards.
"Les graphiques de planches que je réalise pour Magenta, cette B.D. que personne - même pas moi qui la dessine case après case - n'a encore eu l'occasion de lire"
Depuis j'ai compris que le rêve savait mieux que moi, que la peur transforme les rêves en cauchemars, et que le cerveau devait être au service du rêve, alors j'en fait le sujet de ma B.D., et donc des séries de boards Magenta...
J'essaie de mettre en image les solutions que je trouve aux problèmes que je rencontre, pour les partager.
LSM : Que désirais-tu exprimer avec cette part ? A une époque, tu m’en parlais comme un « PARISien » avec plus de tricks. Ensuite, ça a dérivé en Epicly Later’d. Y a-t-il certaines choses que tu aurais aimé montrer, qui ne sont pas concrétisées ? Avais-tu une vision particulière pour ce projet et à quoi ressemblait-elle ?
Soy : Au départ c’etait uniquement skate, cruising, un "PARISien" avec plus de tricks. Puis avec cette histoire de vieux footage, je me suis dit qu’une sorte de rétrospective serait cool.
On est très peu de ma génération à être encore "pro", quoi que cela veuille dire, et à sortir encore des "parts", quoi que cela veuille dire aussi d’ailleurs...
"Il y a toujours une part de séduction lorsqu'on choisit de montrer ce que l'on fait"
Seb Charlot m'avait dit à plusieurs reprises que je devrais faire une sorte de "greatest misses" avec les parts que j'ai eu au cours de ces dix dernières années, et je suppose qu'on retrouve un peu de cette idée dans cette part, même si ça ne reprend pas dix ans de parts, mais des images datant d'il y a presque vingt ans...
J’aurais aimé montrer plus de choses liées au dessin, aux graphiques de planches que je réalise pour Magenta, à cette B.D. que personne - même pas moi qui la dessine case après case - n'a encore eu l'occasion de lire. Mais j'ai peu d'images video de mon travail ; et de ton côté, tu as choisi d'axer la vidéo sur quelque chose de plus sentimental : la rupture et déception amoureuse que je traversais à l'époque où on filmait ces images. Mais ça me donne matière à réfléchir.
Il y a toujours une part de séduction lorsqu'on choisit de montrer ce que l'on fait. Personne n'aime ses défauts, alors peut-être montre-t-on ce que l'on sait faire de mieux pour se séduire soi-même, ou pour séduire un miroir, quelque part.
Le skate est une forme de danse libre, et la danse rien d'autre qu'une parade amoureuse.
Le dessin, lui, est une expression poétique de nos pensées, en ça il est lui aussi une forme de parade amoureuse, adressée à celui ou celle qui saura la lire.
"Toute destruction appelle une reconstruction"
Je suppose que ma vision personnelle pour cette part aurait été plus "positive", moins axée sur la rupture que sur le renouveau, car je suis un optimiste. Mais à l'époque où on a filmé ces images, mon optimiste était assombri, et si je le comprends bien, c'est ça que tu as mis en images.
Et c'est intéressant, il y a du vieux, du récent, de l'intemporel, du daté ; il y a beaucoup de toi aussi dans cette part, ce qui est normal pour toute création artistique.
LSM : A ton avis, pourquoi l’inspiration d’un tel projet ?
Soy : Je crois que c’etait parti de l’idée de sortir une part de skate pour mes quarante ans, c’était un cadeau perso que je voulais me faire...
Ensuite il n'est pas impossible que la rupture m'ait motivé à faire du skate, à aller danser devant une caméra, haha... Toute destruction appelle une reconstruction.
LSM : Où te trouvais-tu avec Glen, la semaine passée ? Tu as eu quelques soucis avec les transports, non ? Que faisais-tu là-bas, et quid de ton actualité générale ?
Soy : On était à Tokyo pour une expo Magenta organisée par le distributeur japonais,
Kukunochi - je suis dans l'avion du retour, là.
J’ai eu quelques galères à l’aller, oui. Pendant un jour et demi, tout ce qui pouvait mal se passer s’est mal passé, et j’ai mis trois jours à arriver à Tokyo au lieu d’un jour - comprenant deux nuits d’hôtel imprévues dans deux villes différentes, dont une n'était même pas sur ma route. Mais pour accéder à un paradis, il faut toujours traverser un enfer, voire le comprendre, et le dompter.
Le reste du trip s’est hyper bien passé, partir quelque part avec Glen est toujours génial, et mes vingt prints du show étaient sold out en deux jours !
On a même du re-printer trois dessins... Merci le Japon !
Actualité générale, des dessins de boards et des designs de fringues pour Magenta, j’ai pas mal de taf qui m’attend à Paris...