"VELVET" / Spencer Legebokoff / INTERVIEW

Spencer Legebokoff shoote et filme du skateboard au Canada depuis longtemps maintenant, mais son nom s'est notamment exporté par-delà les frontières avec « WALTZ », un montage réalisé en tant que pur local de sa région d'origine : l'Ouest de Kootenay, en Colombie-Britannique, qu'il était venu présenter en personne à l'édition 2018 du Vladimir Film Festival, cet évènement indépendant désormais culte et véritable phénomène sociétal se déroulant annuellement et ce, purement grâce aux efforts des locaux de Fažana en Croatie. Puisqu'il s'agit là d'une expérience pour le moins puissante, il en est revenu inspiré, confiant et décidé à pleinement se consacrer à sa vision personnelle du skateboard format vidéo, et ainsi naquit, en toute logique, cette nouvelle oeuvre : « VELVET », quelque chose de plus contemplatif (mais toutefois chargé de skate local sincère) que LIVE est heureux de partager avec vous, aujourd'hui, aux côtés d'un interview exclusif avec Spencer à son sujet, à découvrir ci-dessous !
 
LIVE Skateboard Media : Hello Spencer, bravo pour ta nouvelle réalisation : « VELVET », et merci pour ton temps. Certains se souviennent sûrement de ton précédent travail avec « WALTZ », que tu avais présenté au Vladimir en 2018 mais tout de même, pourrais-tu te présenter et nous raconter d'où tu proviens exactement, au Canada ? Comment décrirais-tu ta ville, ainsi que ta scène ? Et qui des skateurs que tu as choisi d'immortaliser via cette vidéo, en particulier ?
 
Spencer Legebokoff : Mon nom est Spencer Legebokoff et je suis un skateur, filmer et artiste pluri-disciplinaire originaire de la région de West Kootenay en Colombie-Britannique, au Canada. Je suis né et j'ai grandi au sein d'un environnement très rural, à vingt minutes des deux villes les plus immédiates, respectivement fortes de seulement onze mille et huit mille habitants.
 
Parce que nos bourgades sont toutes petites, skater ici implique de penser autrement et de voir un spot dans le moindre recoin de chaque ruelle. Ces explorations nous ont conduit à tisser un lien très particulier avec ce type de terrain urbain.
 

"C'est agréable quand
on est considéré
en tant que personne
et non pas que
comme 'le type
avec la caméra'"

 
Ce dernier film a été principalement filmé sur place, mais il s'y trouve aussi pas mal d'images à Victoria, BC, la capitale de notre province, où j'ai habité pendant un an lors de mon parcours universitaire.
 
Les skateurs dans cette prod sont tous mes amis, et ce sont tous des gens que je suis capable de fréquenter en dehors du skateboard. J'ai fait de ce principle une véritable règle d'or pour ce qui est de mes projets indépendants, car cela génère une meilleure alchimie et surtout, c'est bien plus agréable quand on est considéré en tant que personne et non pas que comme 'le type avec la caméra'.
 

"Présenter quelque chose
à
 Vladimir, c'est
une contribution
de passion,
d'énergie et
d'amour"


LSM : Tu as filmé « VELVET » tout particulièrement pour l'édition 2020 de Vladimir, et puis tu as organisé d'autres avant-premières, par la suite, dans ta région ; à quel point dirais-tu que de voir « WALTZ » sur ce premier grand écran en 2018 a planté en toi la graine de ce nouveau projet, te rappelles-tu de ce que tu avais ressenti, sur le moment, et est-ce véritablement là que l'étincelle du concept de « VELVET » s'est allumée ?

Spencer Legebokoff : Présenter mon dernier film au Vladimir en 2018 a été une véritable expérience surréaliste, qui a pratiquement changé ma vie. Etre témoin de toute cette passion sincère au coeur de projets authentiques, voilà qui m'a réchauffé le coeur et puis, faire partie intégrante d'un corpus collectif m'a remémoré ce que le skate signifie vraiment pour moi, en fin de compte : les relations et rapports avec autrui.

 
J'ai présenté ma vidéo le premier soir du festival et on a eu quelques difficultés techniques, mais ça ne m'a pas abattu, vraiment. Présenter quelque chose à Vladimir, c'est une contribution de passion, d'énergie et d'amour, et non pas l'organisation de projections spectaculaires et parfaites.
 

"Les avant-premières
physiques sont ce dont
on se souvient"

 
C'était ma première fois en Europe et autant dire que l'expérience m'a donné envie de revenir le plus rapidement possible. Je n'ai pas pu venir présenter mon nouveau film à Vladimir 2021 en personne ; néanmoins, je suis heureux d'avoir pu contribuer au programme de l'édition du dixième anniversaire (officiel) de l'évènement.
 
J'ai ensuite organisé trois avant-premières suppémentaires - deux dans une ville à proximité qui s'appelle Nelson, BC, et une autre à Victoria, BC. Je voulais faire l'effort de physiquement projetter ce film car une fois qu'un travail est mis en ligne, de nos jours, il est oublié dans la seconde qui suit, soit tout aussi vite. Les avant-premières physiques sont ce dont on se souvient.
 

"Je voulais
une vidéo qui
se ressente
avant de
se comprendre"

 
LSM : En tout cas, tu as clairement expérimenté avec une direction différence, pour ce projet - quelque chose de plus contemplatif, virant presque vers le sensuel. C'est un chemin que tu as toujours souhaité prendre, ou l'idée s'est-elle constituée avec le temps ? Peut-être que dès « WALTZ », tu voulais l'emprunter, mais qu'il te manquait la confiance ou l'expérience afin d'affirmer cette tendance ? Qualifierais-tu ton expérience au Vladimir d'élément déclencheur ?

Spencer Legebokoff :

 Le Vladimir de 2018 a clairement fait office d'élément déclencheur dans mon approche, cette expérience m'a confirmé dans la voie de réaliser mes vidéos de skate exactement comme bon me semble, sans compromis inutile.
 
« VELVET » est unique au sein de mon corpus car concentré sur l'intimité qui existe entre le skateur, la planche et leur évolution au sein d'un environnement donné.
 
Je voulais une vidéo qui se ressente avant de se comprendre, un peu comme un tableau abstrait. J'ai ralenti la cadence en général, afin de permettre aux spots, aux tricks et au filming de parler d'eux-mêmes, plutôt que de forcer une direction bêtement bornée par les standards des vidéos grand public.
 
Et quand bien même ce film a été tourné pour un public vaste, à y réfléchir, c'est avant tout la documentation de certaines de mes plus proches amitiés, ainsi que de l'effort que mes amis et moi dépensons en skate à faire quelque chose de créatif.
 
C'est une vidéo qui est principalement dédiée à ceux qui en font partie.
 

"Je savais que,
si les skateurs
étaient voués à
réagir d'une
certaine manière,
les non-initiés
en auraient un
avis différent
"

 
LSM : Comment se sont organisées les avant-premières suivantes, après ? Quelque chose à raconter à leur sujet ?

Spencer Legebokoff :

Après l'avant-première de « VELVET » au Vladimir, j'ai organisé une projection à un bar à cocktails et ramen qui s'appelle Red Light Ramen situé à Nelson, BC. Je voulais juste un endroit avec une atmosphère qui me paraissait juste, et il se trouve que Red Light se plaçait là.
 
On a pu projeter la vidéo sur une terrasse en extérieur, ce qui était vraiment bien puisque cet automne-là en particulier, les gens craignaient le Covid. C'était vraiment chouette que de voir tant de mes amis venir regarder le spectacle - skateurs ou non - et tout autant de rencontrer certaines personnes pour la première fois, qui se trouvaient sur place par hasard.
 
Ensuite, j'ai fait une avant-première à Artavi Skateboards à Victoria, BC, organisée par mon pote Leo qui bosse à ce shop et a quelques tricks dans la vidéo.
 
Et puis finalement, j'ai voulu montrer le projet a un public de non-skateurs, parce que je savais que, si les skateurs étaient voués à réagir d'une certaine manière, les non-initiés en auraient un avis différent. Comme disait essentiellement le réalisateur russe Andreï Tarkovski, l'art ne sert à rien en l'absence de réponse. Du coup, j'ai diffusé la vidéo au Touchstones Museum de Nelson, BC, l'un des musées les plus à la pointe des quatre cents kilomètres alentour. C'était un évènement plus posé, moins brut, qui a attiré un panel de gens que je ne connaissais pas du tout alors - la plupart d'entre eux n'étant pas des skateurs.
 

"Chacun de mes travaux
représente en fait
la documentation
de mes influences
à un certain point
de ma vie
"

 
LSM : Dirais-tu que tu avais un but précis, finalement, avec « VELVET » ? Si oui, dirais-tu que tu l'as atteint ? Es-tu satisfait du produit final, y vois-tu déjà des éléments que tu aurais souhaité approcher différemment, ou es-tu en train de travailler sur un nouveau projet, déjà, peut-être (éventuellement dans une toute autre optique, encore) ? Comment t'occupes-tu, ces temps-ci ?

Spencer Legebokoff :

Mon but avec « VELVET » était de faire un film qui se ressente, pas seulement quelque chose qui se voit et s'entend. Je crois qu'une relation s'établit entre un artiste et son spectateur (au moins le temps de quelques minutes) lorsqu'un projet est regardé. Je suis satisfait de ma réalisation.
 
J'ai quelques idées de styles à explorer à l'avenir, mais je me suis aussi rendu compte que chacun de mes travaux représente en fait la documentation de mes influences à un certain point de ma vie.
 
Nos hivers sont longs, ici, avec plus ou moins rien à skater ; du coup, ces temps-ci, c'est la littérature qui m'occupe, en tant que juge de concours de poésie et puis j'écris, moi-même, aussi. A part ça, j'ai mon entreprise spécialisée dans l'arboristerie ; et avec le printemps qui se profile, j'ai le démon du skate qui se réveille, j'avoue, et donc j'ai hâte que la neige fonde...

LSM : OK Spencer, c'est le moment des remerciements ! Si tu as un dernier mot (pour l'instant, du moins !), aussi, n'hésite pas. Merci encore !

Spencer Legebokoff : Avant toute chose et évidemment, je souhaiterais remercier tous mes amis qui figurent dans « VELVET » et qui ont investi des heures, voire des jours de leur temps dans sa création. En particulier, j'aimerais saluer Tommy Fleming et Devin Miller - les deux skateurs proéminents de la vidéo, avec lesquels j'ai davantage filmé.

 
Je souhaiterais aussi remercier tous les gens qui ont été réceptifs à l'organisation des avant-premières : Nikola Racan du Vladimir Film Festival, Korina Langevin de Red Light Ramen, Leo Graceffo de Artavi Skateboards et Stephanie Myers du Touchstones Museum.
 
Les deux animations utilisées dans le film sont des créations originales par Reyna Brown et Aymeric Nocus et donc, merci pour ça aussi. Et puis, merci à tous les musiciens qui m'ont autorisé à utiliser leur travail dans la vidéo.
 
Et enfin, merci à Live Skateboard Media pour la diffusion de mon projet sur cette plate-forme !
 
 
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